Requerimiento

Le Requerimiento (sommation) est un texte rédigé en 1512 par un juriste espagnol du nom de Juan Lopez de Palacios Rubios pour donner une réponse légaliste aux problèmes moraux posés par la Conquête : Dieu a créé le monde, il l’a confié à Saint Pierre, et à ses successeurs. Le Pape a donné l’Amérique à l’Espagne. Les Indiens informés étaient sommés de se soumettre, ou encouraient la destruction ou l’esclavage.

Le Requerimiento (sommation) est un texte rédigé en 1512 par un juriste espagnol du nom de Juan Lopez de Palacios Rubios pour donner une réponse légaliste aux problèmes moraux posés par la Conquête : Dieu a créé le monde, il l’a confié à Saint Pierre, et à ses successeurs. Le Pape a donné l’Amérique à l’Espagne. Les Indiens informés étaient sommés de se soumettre, ou encouraient la destruction ou l’esclavage.

Montaigne en parle dans ses Essais en ces termes : « En costoyant la mer en quête de leurs mines, aucuns espagnols prirent terre en une contrée fertile et plaisante, fort habitée, et firent à ce peuple leur remontrance acoutumée : Qu'ils étaient gens paisibles, venans de lointains voyages, envoyez de la part du Roy de Castille, le plus grand prince de la terre habitable, auquel le Pape, représentant Dieu en terre, avait donné la principauté de toutes les Indes ; que, s'ils voulaient luy estre tributaires, ils seraient très bénignement traictez; leur demandait des vivres pour leur nourriture et de l'or pour les besoins de quelque médecine ; leur remontroient au demeurant la créance d'un seul Dieu et la vérité de notre religion, laquelle ils leur conseilloient d'accepter, y adjoutans quelques menaces ».

Et Bartolomé de las Casas dit en dit : « C'est se moquer de la vérité et de la justice, et c'est une grande insulte à notre foi chrétienne, à la piété et à la charité de Jésus-Christ, et cela n'a aucune valeur juridique ».

« Au nom du Roi, Don Ferdinand, et de sa fille Dona Juana, reine de Castille et Leon, conquérants des peuples barbares, nous leurs serviteurs, vous notifions et vous faisons savoir, le mieux qu’il nous est possible, que Dieu notre seigneur, unique et éternel, a créé le ciel, la terre, un homme et une femme, desquels nous et vous ainsi que tous les hommes du monde, passés et présents, nous sommes descendants et de qui descendront tous ceux qui viendront après nous. Mais le grand nombre des descendants de ces premiers parents a été cause qu’il y a cinq mille ans et plus, depuis la création du monde, il a été nécessaire qu’une partie de ces hommes s’en allassent d’un côté, et une autre partie d’un autre côté, et qu’ils se divisassent dans un grand nombre de royaumes et de provinces, car ils ne pouvaient tous subsister dans une même contrée.

Dieu, notre Seigneur, a chargé un de ces hommes, nommé Saint Pierre, d’être le souverain de tous les hommes, dans quelque pays qu’ils habitassent et quelles que fussent leurs lois et leur religion. Dieu lui a donné le monde entier pour royaume, seigneurie et juridiction.

Il lui a ordonné pareillement d’établie son siège à Rome, comme étant l’endroit où il pouvait le mieux gouverner le monde. Cependant il lui a permis aussi de résider et d’établir le siège de sa puissance dans tout autre endroit du monde qu’il voudrait, pour juger et gouverner tous les peuples chrétiens, maures, indiens, païens, enfin de quelque religion qu’ils fussent.

On l’a nommé Pape, ce qui veut dire admirable, le père et le gardien suprême parce qu’il est le père et le souverain de tous les hommes.

Les hommes qui vivaient à cette époque ont obéi à ce Saint Pierre et ils l’ont reconnu comme roi et souverain de l’univers, et ils ont considéré de même tous ceux qui, par la suite, ont été promus au pontificat. Cet usage a été suivi jusqu’à présent et durera jusqu’à la fin du monde.

Un des pontifes passés, qui monta sur ce trône et qui succéda à la dignité de ce prince dont je viens de parler, en qualité de souverain du monde, a fait don des îles et de la terre ferme qui se trouvent au delà de la mer de l’océan aux dits roi et reine, héritiers de ces royaumes, nos seigneurs ainsi que de tout ce que ces contrées contiennent, comme cela a été arrêté dans ces certains actes qui ont été dressés à ce sujet, et dont vous pouvez prendre connaissance si vous le voulez, de sorte que leurs Altesses sont souverains de ces îles et de la terre ferme, en vertu de ladite donation, et en cette qualité de roi et maître, la plupart ou presque toutes ces îles, aux habitants desquels on a notifié cette donation, ont reconnu leurs Majestés, leur ont obéi et leur obéissent comme le doivent faire des sujets, de leur plein gré, sans résistance aucune, au moment où ils furent informés de ce qu’on vient de vous faire savoir, ils se sont soumis aux dignes religieux que leurs Altesses leur ont envoyés pour les convertir et les instruire dans notre sainte foi Catholique, et cela de bon cœur et librement, sans indemnité, ni condition aucune; ils se sont faits chrétiens et ils le sont encore aujourd’hui. Leurs Altesses les ont reçus comme sujets avec joie et avec bonté; elles ont ordonné de les traiter comme leurs autres sujets, et vous êtes tenus et obligés de faire de même.

En conséquence, et le mieux que nous pouvons, nous vous prions et vous enjoignons de bien considérer ce que nous vous avons dit, de le regarder comme chose entendue, de vous consulter là-dessus pendant tout le temps qui sera justement nécessaire, et de reconnaître l’Eglise comme reine et souveraine du monde entier et en son nom le souverain pontife, nommé pape, représenté par la Reine et le Roi, nos maîtres, qui sont les souverains et les rois de ces iles et de la terre ferme en vertu de ladite donation, de consentir et de faire en sorte que ces religieux vous apprennent ce que nous vous avons déjà énoncé.

En agissant ainsi vous vous en trouverez bien, vous remplirez votre devoir; leurs majestés et nous-mêmes en leur nom, nous vous traiterons avec affection et charité, nous vous laisserons la possession libre de vos femmes, de vos enfants et de vos biens, sans que vous soyez soumis à aucune obligation, afin que vous en fassiez ce que vous voulez en toute liberté. On ne vous forcera pas à embrasser le christianisme, mais lorsque vous serez bien instruits de la vérité et que vous désirerez être convertis à notre saine toi catholique, comme l’ont fait presque tous les habitants des autres îles, on vous fera chrétiens, et en outre Sa Majesté vous accordera de nombreux privilèges, beaucoup de faveurs, et vous fera instruire.

Si vous ne le faîtes pas, et si par malice vous tardez à consentir ce que nous vous proposons, nous vous certifions qu’avec l’aide de Dieu nous marcherons contre vous les armes à la main; nous vous ferons la guerre de tous côtés et par tous les moyens possibles; nous vous soumettrons au joug et à l’obéissance de l’Eglise et de Sa Majesté, nous nous emparerons de vos personnes, de celles de vos femmes et de vos enfants, nous vous réduirons en esclavage, nous vous vendrons et disposerons de vous suivant les ordres de Sa Majesté, nous prendrons vos biens, nous les ravagerons et nous vous ferons tout le mal possible comme à des sujets désobéissants.

Nous vous signifions que ce ne sera ni Sa Majesté, ni nous, ni les gentilshommes qui nous accompagnent qui en seront cause, mais vous seuls.

Nous enjoignons au notaire présent et aux autres personnes qui l’accompagnent d’être témoins de ce que nous vous signifions ».